Comme beaucoup d'hommes Camden était trop fier. Une fierté mal placée qui risquait de le noyer encore plus que la vie ne l'avait fait. Lillyana n'avait pas tous les détails de sa vie, de son histoire avec Angie mais il n'était pas compliqué de comprendre certaines choses que lui refusait d'admettre. Pour le reste elle le provoquait pour qu'il parle, pour qu'elle puisse mieux l'aider justement car il s'était forgé une carapace. Ou plutôt portait il un masque pour s'emmurer dans sa douleur. ET visiblement sa technique payait car il s'ouvrait un peu plus, parlant d'Angie et des conséquences de sa dernières missions, physiques et morales. Il était en colère mais il avait peur sans le dire. Peur que le regards des autres changent sur lui, de ne plus être le même. Elle ne comprenait pas pourquoi il portait tant d'importance au jugement de ces personnes qui n'étaient sûrement pas toutes ses amis, pour le reste c'était triste à dire mais quoi qu'il fasse il n'était plus l'adolescent ou le jeune homme que tous avait connu. Et ça, rien n'y ferait; c'est la vie tout simplement. Tout le monde change et encore plus après les épreuves. Il fallait juste qu'il comprenne qu'il n'était pas moins bien, moins intéressant ou quoi... Mais pour le moment elle garda ses réflexions.
Il lui confia alors qu'il ne se batterait pas pour Angie si c'était pour être exclu dès que quelque chose n'irait pas. Elle hôcha la tête comme si elle comprenait. Seulement on ne savait jamais ce genre de choses à l'avance. L'amour est cruel parce que l'Homme l'est, en plus d'être égoiste et incertain; dès lors qu'on commençait une histoire, on prenait le risque qu'elle finisse. Et qu'elle finisse mal. Lillyana donnerait n'importe quoi pour revivre ça, quitte à souffrir. Biensûr elle rêvait d'une histoire d'amour sans faille mais c'était utopique.
Quand au fait qu'il soit un héros, c'était encore une chose qu'il n'admettait pas et il se contredisait tout seul à ce sujet. Quelle tête de mule ! Elle leva les yeux au ciel et continua la conversation en lui disant que pour bien donner il fallait savoir recevoir. Sa réponse le fit hausser les épaules. Elle ne parlait pas de se faire aider que lorsqu'on est platré jusqu'au cou dans un lit d'hôpital. « Tu joues sur les mots. Tu m'as très bien comprise. » Puis finalement elle garda son calme, bien qu'elle ai eut envie de le secouer pour se sortir les doigts du cul comme on dit chez elle. Il ne se plaignait pas mais il semblait errer dans la ville, dans sa vie comme un zombie qui se cherche des excuses pour se punir lui même. Comme s'il se complaignait dans sa misère et ça, pour elle, c'était aussi nul que de se plaindre pour rien. d'autant plus qu'il avait de quoi se plaindre ! Sans dire qu'il devait y passer sa vie mais que ça sorte et qu'ensuite il passe à autre chose. Bref... Elle posa sa main sur la sienne pour mettre un terme au débat stérile pour ce matin. Et pour plaisanter elle conclut qu'elle avait raison de toute façon ! Lorsqu'il fut debout elle le serra dans ses bras, un geste anodin mais qui marchait toujours avec elle et lui réchauffait le coeur, façon de parler. Elle se demanda alors depuis quand Camden n'avait pas reçu de tendresse. Il en avait besoin en tout cas ! Alors ils commencèrent à marcher vers la maison qu'elle partageait avec Vivienne, d'ailleurs la maison était à elle en fait. Une belle demeure proche de la plage, le cauchemar de Lilly et sa thérapie en même temps. Il demanda alors s'ils pourraient y faire des choses folles et Lilly éclata de rire lorsqu'il se rattrapa pour préciser qu'il ne lui faisait pas d'avance. « Ah bon ? Tu ne me proposais pas une partie de sexe ? Mince, alors ! » Chose qu'il lui rappela qu'elle n'avait connu que deux hommes dans sa vie, ce qui ne faisait pas d'elle une experte, loin de là ! « Oui on pourrait changer chaque chose de place dans la chambre de Vivienne pour la rendre folle ! Elle me fait toujours des blagues, il faut que je me venge ! » Les deux coloc s'entendaient comme des soeurs, toujours à se chamailler et se raconter leurs petites histoires. Tout en marchant ils discutèrent de choses futiles, s'arrêtant parfois sans raison mais sans que ce soit le genre de silence qui met mal à l'aise.
Quinze minutes plus tard ils arrivèrent à la jolie maison. Vivienne était déjà partie au harras, sa voiture n'était plus là. « J'espère que la goulue n'a pas vidé le frigo ! » dit elle en ouvrant la porte. Une odeur de chocolat flottait encore dans l'air. « Je te laisse te mettre à l'aise ! Café je suppose ? » lui demanda-t-elle en se tournant vers lui et retirant ses chaussures après avoir posé sa guitare contre le mur. Elle était plus à l'aise pieds nus. Dans l'entrée déjà il y avait une photo encadrée des deux jeunes filles lors d'une fête, elles se regardaient en éclatant de rire et l'on pouvait y lire leur complicité. Lilly trouvait qu'elle avait l'air d'une débile mais dès qu'elle voyait cette photo elle était de bonne humeur.

Il n’aimait pas voir l’attention focalisé sur lui. Camden était de ceux qui préférait l’anonymat à l’attention. Certains paieraient cher pour être sous le feu des projecteurs. Camden n’a jamais fait parti de ses personnes. Peut-être entre autre parce qu’il était de ses personnes trop introverti pour se sentir à l’aise lorsque l’attention se portait sur lui. Au cours de sa conversation avec Lillyana, il en avait trop dit. Du moins, il en avait l’impression. Elle avait cette fichu habitude de le pousser trop loin, de lui tirer les vers du nez que ça en était agaçant. Enfin le pire c’était quand elle abordait le sujet d’Angie. Il détestait qu’on décortique ses sentiments car lui-même ne savait pas ce qu’il voulait. L’aimait-il encore ? Voulait-il qu’Angie retrouve une place entière dans sa vie ? Etre son amie ? Cam’ ne savait pas. Bien sûr qu’il aurait toujours des sentiments pour elle. A vrai dire, il ne pourrait jamais la rayer de son existence. Elle a été sa femme et même si parfois, il souhaiterait que la situation soit différente, il sait qu’aujourd’hui leurs métiers risquaient de les mettre en opposition totale. Il aimerait juste trouver un sens à sa vie.
Parler avec Lillya, c’était plus simple parce qu’elle savait ce qu’on pouvait ressentir après avoir perdu ceux auquel on tenait. Cam’ avait néanmoins plus de difficulté à gérer cette culpabilité qu’il éprouvait à chaque fois que l’oxygène venait gonfler ses poumons. Ainsi, ils auront toujours des points de désaccords. Comme le fait de toujours donner et de recevoir trop peu. Il reçoit contrairement à ce qu’elle pense mais il n’est pas du genre à s’étaler sur ce genre de chose. Mystérieux, humble et simple, ça pouvait résumer l’homme qu’il était. Tout ça parce qu’il ne se plaignait jamais et semblait toujours vouloir garder la tête haute. Ça n’était pas qu’il n’acceptait pas l’aide qu’on lui offrait, ni même une question de fierté, c’était juste qu’il songeait ne récolter que ce qu’il mérite. C’est-à-dire d’être mis au placard par l’armée.
Enfin debout, il fut surpris sur le coup, par l’instinct de tendresse de Lillyana. Cependant, il ne repoussa pas son élan de tendresse, chose qu’en qualité de Marines, il n’avait plus reçut depuis bien longtemps. A vrai dire, il n’y avait dans sa vie que trop peu de personnes pour qu’on en arrive à de tels élans amicaux.
Avançant lentement vers la maison donnant sur la plage, il se demanda comment Lillya pouvait gérer ça. Sachant qu’elle avait survécu. Sa remarque ne tomba pas dans l’oreille d’une sourde et un lent sourire se peignit sur les traits du Marines : « Si t’es en manque à ce point, j’suis sure que j’peux trouver quelqu’un pour combler tes attentes ! » Pourquoi pas lui ? Il pourrait après tout. Mais il ne tenait pas à voir leur relation prendre un autre tournant que celui d’une sincère amitié. Sa réponse l’amusait même si voyait quelque chose de plus poussé. « J’imaginais plutôt de vider certains de ses tiroirs et d’y remplacer par une mixture gluante ou encore de mettre le bazar dans un de ses placards pour qu’au moment où elle l’ouvre tout lui tombe dessus… » imagine-t-il alors qu’ils pénètre lentement dans la maison, les idées germant les unes derrières les autres dans son esprit.
Passant en revue, les premières pièces, il nota l’impressionnant living-room qui donnait directement sur la plage avec une grande baie vitrée. Une vue imprenable comme seul les habitants sur la plage peuvent en avoir. C’est uniquement après coup qu’il réagit aux propos de Lillyana. « Oui. » répond-t-il avec ce sourire naturel. « La seule drogue dont j’arrive pas à me passer. » ironise-t-il avant d’avoir fait le tour du salon et de revenir vers elle. « vous avez l’air de bien vous entendre toutes les deux. » fit il en désignant l’une des quelques photos où les deux jeunes ne semblaient pas s’ennuyer ensemble. « Le pays te manque pas trop ? »

Pour Lillyana, Camden était un peu une sorte de faux discret. Le mec qui ne veut pas voir le feu des projecteurs sur lui mais qui ne peut s'empêcher de faire des actions qui le mettront dans cette position. Pas dans le sens où il faisait son intéressant mais il se mêlait de choses, comme sa soirée de charité, qui forcément allait attirer les regards sur lui. S'il se contentait, comme beaucoup d'avoir une vie pépère à ne s'occuper que de ses petites affaires, alors personne ne lui prêterait attention hormis ses proches. C'était comme choisir l'armée, on parle toujours des compatriotes qui se battent pour le pays dans de lointaines contrées, où Lilly se demandait pourquoi ils se battaient en réalité mais bon... Bref la jeune anglaise se servait souvent de petites attaques pour le faire sortir de ses gonds et cracher le morceau sur ce qui n'allait pas car il fallait qu'il réalise que se confier à une amie ce n'était pas être sous les feux de la rampe, c'était juste normal. Sinon à quoi bon avoir des proches ? Comme souvent une fois que c'était sorti il semblait regretter mais la machine était lancée. Lilly y mettait un stop dès qu'elle voyait que ça prenait une mauvaise tournure, elle n'avait pas non plus envie qu'ils se fachent. Car il fallait bien avouer que si de douloureux points communs les rapprochaient, leur façon d'appréhender les choses les séparaient. Ils ne se battaient pas de la même façon. Pour clore la discussion Lillyana lui fit un câlin et lui proposa d'aller déjeuner chez elle, enfin chez Vivienne précisément.

Ils plaisantèrent enfin, Lilly semblant être d'accord pour plus avec Camden qu'un élan d'amitié. Il lui lança alors qu'il pourrait lui trouver quelqu'un et elle haussa les épaules. « Pourquoi un autre alors que tu ferais très bien l'affaire ? Je suis sûre que t'es pas mauvais ! » Dit elle en riant. Elle n'y avait songé et n'en avait pas envie. Il était beau gosse mais elle ne se voyait pas dans un lit avec lui pour parler franchement. Ils enchainèrent ensuite sur quelle façon embêter Vivienne. Décidément Camden avait de l'imagination, faisait il ça à l'armée ? « L'idée de vider les tiroirs est pas mal !! La texture je ne sais pas, j'ai pas envie qu'elle me fasse pareil ensuite ! » La jeune française n'était pas la dernière pour les idées de blagues de potache et Lillyana n'était pas très courageuse on va dire ! La vengeance de sa coloc la freinait un peu.
Ils arrivèrent enfin et elle lui proposa un café. Elle se dirigea vers la cuisine et il ne tarda pas à l'y suivre tandis qu'elle remplissait un mug avec le liquide noir. « Oui franchement je n'aurai pu rêver mieux. Vivi est comme la petite soeur que j'ai jamais eue ! » Elle mis le mug au micro onde et lança la bouilloire pour son thé. On ne se refait pas et la question de Cam' prenait tout son sens. « Et bien ce n'est pas si différent dans le sens où c'est assez campagne ici aussi, mais oui... Les pubs, les épiceries, les chocolats cadburry, le cidre, la bière... Tout ça me manque. Et mon père. Mais j'irais y passer quelques semaines dans pas longtemps. Je fois finir mon livre d'abord. Si ça te dit, tu es le bienvenue ! Tu as déjà été en Ecosse ?» Lilly était anglaise mais avait emménagé près de Glasgow après le divorce de ses parents. Elle se sentait écossaise d'adoption si l'on puis dire ! Et en parlant de ce qui lui manque, elle se dit qu'il faudrait vraiment qu'elle songe à importer ce que les américains ne connaissaient pas et loupaient ! La sonnerie du four retentit et elle sortit le mug, le posant sur le comptoir de la cuisine face à Camden et sortit ensuite le sucre et des muffins. Ainsi que son sachet de thé, qui lui était importé !

Il aimait l’armée. C’était la seule à ne pas l’avoir lâché du moins. Il se sentait souvent redevable. Pourtant, si Camden gardait bien souvent son opinion enfermé dans une boite à double tour, il n’irait jamais un code d’honneur en révélant ce que l’armée dissimule. Honnête et droit, Camden a passé ses dix dernières années sur des missions toutes plus périlleuses les unes que les autres. Lorsqu’il rentre chez lui, il a besoin d’être occupé. Rester les bras croisés et tourner en rond dans son appartement, ça n’est plus envisageable. Alors oui, évidemment, Camden est souvent présent sur les différentes activités de la ville lorsqu’il est de retour. Ça n’est pas pour se montrer. Il n’aime pas être sous le feu des projecteurs, c’est son côté humain et sa générosité qui prend le relais. Il aide, il prête main-forte, il rassure, il assume de faire partie de cette communauté et la ville ne lui a jamais tenu rigueur de son départ. Pas comme c’est le cas pour Angie. Il sait qu’elle finirait par remonter dans l’estime des habitants mais lui, est conscient que ça pourrait prendre du temps.
Parler avec Lillyana, c’est souvent problématique parce qu’elle a tendance à le pousser au bord du précipice pour qu’il lâche ce qu’il retient en permanence. Il comprenait la démarche de son amie mais en même temps, il préférait ne pas avoir à se dévoiler à elle. Car il veut que la boite de pandore reste close, pour le bien de tous. Il ne lui dirait jamais tout ce qui le ronge et Lillyana devait certainement bien le savoir, repartant finalement à plaisanter, ils prirent le chemin de la maison que la brune partageait avec la petite mais piquante Vivienne.

Poursuivant leur marche, la conversation s’allège et bien vite il répliquait qu’il était bien capable de lui trouver un homme, si c’était ce qu’elle cherchait. Sa réponse fit lentement naitre un sourire sur son visage. « C’est pas la question. Tu mérites mieux qu’un militaire torturé. C’est pas les mecs qui manquent dans cette ville. » Finit-il en haussant les épaules, tout en se disant qu’il ne serait surement jamais capable d’aimer à nouveau une femme. Pas après son histoire avec Angie. Il était toujours inévitablement attiré vers elle. Par ses pensées et même lorsqu’il arrivait qu’elle soit mentionné dans une conversation. Il était irrémédiablement accroché à elle, comme une corde à son arc et rien ne semblait capable de l’en défaire. L’idée de mettre le bazar dans les affaires de Vivienne ne pouvait pas faire plus plaisir à Camden. Lilly ignorait jusqu’où les militaires pouvaient aller lorsqu’ils étaient à la base. Même désormais gradé, il n’était pas rare qu’entre eux, ils s’autorisent des blagues de mauvais goûts, même plus souvent qu’on ne pourrait le croire alors vider un placard, ça ne serait vraiment pas grand-chose. « Courageuse mais pas téméraire, hein ! » lance Camden en lui donnant un léger coup d’épaule.

Bien vite ils arrivaient à la maison où l’odeur du café venait emplir la pièce. Il était un grand consommateur. Parfois, il n’y avait que ça pour le tenir éveillé et empêcher les cauchemars venir brouiller son sommeil. Alors que la jeune femme versait le café dans le mug, il lui sourit naturellement. « T’as de la chance. Moi tout c’que j’ai gagné à la base, c’est de récupéré ma casse pieds de meilleure amie. Une vraie fouine qui fout son nez partout et qui te fait tourner en bourrique ! » Explique-t-il en songeant à Mack qui avait toujours pour but de le faire sortir littéralement de ses gonds. Une vraie teigne par moment. Mais il l’adorait. Observant les gestes de Lilly la question se posa d’elle-même lorsqu’il vit la bouilloire. La simple façon qu’elle avait d’en parler était évocateur. L’évidence même que si elle se plaisait ici, sa maison ça resterait l’écosse et rien d’autre. A sa question, il considéra qu’il considéra un instant, réfléchissant où chacune de ses missions avait pu le mener. « Pas à mon souvenir. J’me souviens avoir passé des heures dans la jungle irlandaises. Pas mon meilleur souvenir ça… » Marmonne-t-il avant de grimacer en se rappelant le froid et la flotte qui leur tombait toujours sur le coin du nez, en plus de la fois où son second avait mal lu la carte et qu’ils avaient failli se perdre. « J’suis allé à Reykjavik mais l’écosse, non. Tu m’emporterais dans tes bagages ? T’as pas intérêt à me présenter à ton père comme futur gendre hein ! » Plaisante-t-il alors qu’elle déposait devant lui son mug de cafés et sortait des muffins. Le calme emplissait la pièce et le soleil ne tardait déjà pas à taper contre les vitres amenant, lumière et chaleur par la même occasion. Un moment de calme total, comme il devait en être chaque matin dès que le soleil se levait.

Lillyana sentait bien que Camden aimait son métier. D'ailleurs tous ceux qui le connaissaient devaient le savoir, ça se sentait à sa façon d'en parler. Mais ce n'était pas un métier facile, ni pour les soldats ni pour leur famille... Trop de sacrifices, de peur au ventre etc. Lillya plaignait les femmes de militaires et elle n'aurait jamais pu être avec l'un d'eux. L'ex de Camden avait du finir par ne plus supporter la situation et croire qu'il préférait son métier car il ne la choisissait pas, enfin c'est ce qu'elle imaginait car c'était souvent le cas dans ce genre de situation. Enfin bref !
Elle savait que Camden devait parfois appréhender ses entrevues avec elle car elle le poussait toujours dans ses retranchements. Tout garder pour soi ne réglait aucun problème, bien au contraire. A trop s'accrocher à ses souffrances, à sa fierté, ou quoique ce soit, on n'avançait pas dans la vie. On répétait toujours les mêmes scénarios et l'on sombrait encore plus. Les frustrations faisaient de nous des personnes irritables, perdues, ou dépressives. Alors quel meilleur moyen de s'en sortir, que de les expulser ? Biensûr se lâcher faisait peur car personne n'aime entendre la vérité nue mais si seulement on essayait, et bien, on n'aurait même pas à en venir à ce genre de situations. Quoi ? Lillyana lisait trop de livres sur la psychologie, la pensée positive et l'acceptation de soi ? Peut être mais ça marchait !
Mais pour l'heure, elle savait que son ami n'était pas prêt, aussi passa-t-elle à autre chose pour faire retomber la pression et ils allèrent chez elle. Elle ne releva pas quand il se rabaissa une fois de plus, à dire qu'elle méritait mieux qu'un mec comme lui et haussa les épaules également. Oui les mecs ne manquaient pas dans cette ville et elle en avait un en tête d'ailleurs.
Camden proposait de faire une farce à Vivienne, la colocataire de la belle anglaise mais elle n'osait pas aller si loin. « Voilà c'est bien ça ! J'ai trop peur de sa vengeance ! Les françaises sont folles, tu sais ! » dit elle en riant. Une fois dans la maison, ils allèrent dans la cuisine et elle lui versa du café dans un mug, tout en évoquant Vivi qui était devenue comme une soeur pour elle. Oui elle avait eu de la chance de tomber sur elle. Il fit semblant de se plaindre de vivre avec sa meilleure amie. « Je ne savais pas que tu vivais avec ta meilleure amie ! Il faudra que tu me la présentes un jour, qu'on puisse se liguer contre toi ! » Elle ne put s'empêcher de se demander s'ils n'avaient toujours été que des amis, jamais amants ? A moins qu'elle ne soit lesbienne ? Oui, Lillya avait du mal à croire qu'une amitié mixte puisse être sans arrières pensées, à moins que ce fut déjà consommé et là plus de problèmes !
Elle se servit du thé et Camden se demanda si elle n'avait pas le mal du pays. Au début oui, sûrement parce qu'elle était dans une grande ville mais ici, c'était un peu comme à la maison. Car biensur, rien ne remplacerait la ville où elle avait tout vécu. Camden n'avait jamais été en Ecosse. Il avait fait l'Irlande, mais visiblement pas les coins les plus agréables et Reykjavik ? « C'est où ? Islande ? Norvège ? Oui dans mes bagages si t'as pas de sous pour le billet d'avion ! Quand à mon père, on verra si t'es sage ! » Elle sortit des muffins et les posa devant Camden, prenant place face à lui avec son mug de thé. Il faisait bon dans la maison, c'était agréable de sentir le soleil sur sa peau. Elle prit une gorgée de thé bien de chez elle et hésita à ajouter un peu de lait mais finalement... « Tu avais des plans pour aujourd'hui ? Sinon je t'emploie comme lecteur test pour quelques heures ! » Elle avait besoin de l'avis d'un homme pour certaines scènes et Camden serait sincère, elle n'en doutait pas.

Son métier était-ce une vocation pour Cam’ ? En y réfléchissant, il aurait pu choisir bien d’autres filières. Il n’est pas devenu militaire pour la gloire ou la reconnaissance. Il voulait voyager mais surtout, il voulait aider, se battre pour une cause noble. Alors oui, devenir Marines n’avait pas été aisé. Etre coupé de ses proches, de ses amis mais surtout d’Angie. Combien de nuits a-t-il passé debout à penser à elle ? A penser à ce qu’il aurait pu lui arriver au cours de ses reportages. Leur histoire était-elle de celles qui ne sont pas faite pour durer ? A chaque fois que la question venait le perturber, une seule réponse s’imposait à son esprit : « Non. » Sauf qu’après une conversation et des années, ils étaient désormais divorcés. Mais pas pour les bonnes raison, rectifia-t-il dans sa tête. Leurs sentiments n’ont jamais été la cause de leur divorce comparativement à bien des couples où la passion et l’amour s’étaient estompés au fil des années.

Enfant et même adolescent, au contact d’Angie il s’était épanoui. Depuis son entrée dans l’armée, il avait bien changé. Pour certaines personnes ce changement n’était pas perceptible. Néanmoins, il n’était pas du genre à se confier facilement. Certainement parce qu’il avait passé trop de temps loin de ses proches et que l’armée était devenu sa famille. La seule famille avec qui il parvient à évoque ses véritables problèmes. C’était alors difficile pour lui de parler à ceux avec qui il a grandi. Il a vu des choses. Trop. Des images sont ancrées dans sa mémoire. Des images qu’il aimerait pouvoir rayer de son esprit. Mais ça, il ne peut pas réellement l’évoquer avec ses amis. Ni même, ses opérations et hospitalisations qu’il a dû subir. Parce qu’il ne supporte pas l’idée que l’on s’inquiète trop pour lui.

A sa suggestion, oui, Lillya méritait beaucoup que lui. Il se doutait qu’elle ne comprendrait pas son raisonnement et puis, il ne voulait pas perdre son amitié. Sans parler du fait qu’il ne serait pas juste pour eux de coucher ensemble alors qu’il aurait quelqu’un d’autre en tête. Celle-là même qui ne parvenait jamais à sortir de son esprit. S’il avait pu sortir Angie de son cœur, tout aurait été plus simple et peut être qu’il aurait pu envisager de rencontrer d’autres femmes. Mais à chaque qu’il en croisait une, c’est le regard d’Angie qu’il cherchait partout, ainsi que son sourire, et ce petit rire nerveux qu’elle pouvait avoir lorsqu’on se mettait à la chatouiller. Non, il n’était pas prêt à tourner la page.

La remarque de Lillya le fit sourire. Elle avait peur des représailles de sa colocataire. « C’est parce que t’es trop sage. Tu crois qu’il se passe quoi à la base ? T’as pas idée du nombre de blagues douteuses auxquelles j’ai été mêlé. » Glousse-t-il avec un petit sourire nostalgique. « Enfin c’était avant… avec mon unité. » finit-il dans un murmure. Il n’était pas ici pour aborder ceux qui n’étaient plus là et encore moins de ce gouffre qui l’avait happé en perdant cette famille qu’il s’était constitué au fil des années. Au fil de la conversation, il retrouva lentement le sourire au propos de Lillya qui considérait Vivienne comme sa sœur. Comme lui avec ses compagnons d’armes. Ses frères. Une famille comme il n’en avait jamais eu. Il laissa pourtant échapper qu’il vivait avec sa meilleure amie. « Non non non ! T’as pas besoin de faire alliance avec elle ! » plaisante-t-il en levant les yeux au ciel. « C’est une tornade qui a pour effet de faire de ta vie un enfer… Et je ne suis que l’une de ses nombreuses victimes. A la base, les officiers n’ont qu’un nom à la bouche… le sien ! j’te laisse imaginer pourquoi. » Mack avait le chic pour ça. Elle foutait la merde partout où elle passait et c’était peu dire. « J’suis sûre que tu la connaîtra avant même de savoir que c’est ma meilleure amie et ma coloc’ ! » ironise-t-il avec un sourire naissant sur le visage. Mack était l’ange et le démon à la fois. Seuls ceux qui la connaissant profondément, savaient que Mack se planquait derrière une attitude de bout en train. Leur relation lui était précieuse parce qu’il n’y avait jamais eu d’ambiguïté entre eux. Mack l’avait écouté parlé d’Angie, et les silences de Camden en disaient beaucoup plus que ses rares confidences sur la femme qu’il aime. Il n’en avait fallu guère plus pour que cette attitude les rapproche indéniablement. Pourtant, il n’y a jamais rien eu d’autre qu’une sincère et profonde amitié entre eux.

En parlant de pays, Camden en avait visité pas mal en coup de vent. Comme à chaque mission. Ils n’avaient pas vraiment le temps pour du tourisme. Il avait vu beaucoup de paysage. Il avait aimé le calme et les paysages verdoyant de l’Irlande mais il ne se sentait chez lui qu’ici. C’est surement pour ça qu’il n’avait jamais rendu son appartement et qu’il y revenait dès qu’une occasion se présentait. C’était sa terre, ses racines et c’était important pour lui d’appartenir à un endroit. A ses questions, il sourit doucement. « Oui en Islande. Pour le peu de temps que j’y suis resté, j’ai trouvé ça pas mal… » et il n’y était pas resté plus de 72 heures. Ça pouvait en dire long. Il ne put s’empêcher de rire. « T’oublie qu’en qualité de militaire, j’ai un pass pour voyager partout dans le monde. Et généralement, on a toujours droit à quelques faveurs par les compagnies aériennes. » Poursuit-il tandis qu’elle lui répliquait qu’elle ne dirait rien s’il restait sage. « ça marche pas le chantage. Tu m’auras pas comme ça. » Répliqua-t-il en levant son café à ses lèvres alors qu’elle sortait les muffins. Il appréciait ces matinées où il pouvait être témoin du nouveau jour qui se levait. C’était dans ses moments-là, qu’il se sentait si désespérément seul et pourtant, il savait qu’il avait toujours ses amis ici pour lui apporter un soutien. Des plans pour aujourd’hui, Cam’ n’avait pas un emploi du temps surchargé, il devait l’admettre. « Des plans comme éviter mon ex-femme et tourner en rond chez moi ? J’pense pouvoir me libérer quelques heures pour une bonne action… et devenir un lecteur test… comme tu le dis. » Déclare-t-il comme si de rien était. Car c’était à sa que ressemblait sa vie. Au moins à la base, il avait toujours de quoi s’occuper et s’il rentrait, il tomberait sur Mack qui n’hésiterait pas à le faire sortir de ses gonds pour qu’il ait enfin « LA GRANDE CONVERSATION » avec Angie. « J’ai jamais aussi prêt à être un lecteur test en fait ! »

Lillyana essayait de ne pas être trop... quel serait le mot juste ? Dure ? Froissante ? Envers Camden. Elle essayait de le comprendre même si ce n'était pas chose facile. Ils n'avaient pas grandit ensemble, elle n'avait que des bribes de sa vie et elle faisait avec ce qu'il lui racontait. Elle espérait juste pouvoir l'aider un peu, comme ferait tout ami. Le jeune homme avait, semble-t-il juste du mal à accepter l'aide des autres et baisser sa garde, ou cette muraille qu'il avait dressé pour se protéger de tout. Lillya aussi s'était construite une carapace. A l'époque où Damian sortait avec Emma, elle ne voulait pas que ses amis la voient souffrir de le voir en aimer une autre. Et elle était restée sa meilleure amie, en dépit du mal que ses confidences pouvaient lui faire. Puis elle en avait porté une autre, plus épaisse quand elle avait perdu son seul Amour et ses amis. Mais depuis qu'elle était ici, elle la retirait petit à petit, sentant plus à l'aise pour se laisser aller. Notamment avec Viviane, sa colocataire à qui Camden voulait faire une blague qu'aucune fille ne pourrait apprécier. « Oh je me doute bien que tu ne devais pas être le dernier à faire des conneries, mais c'était des mecs ! Là on parle de Vivianne .» dit elle en riant, sans relever le murmure de Camden. Pas moyen de se laisser déprimer, ils avaient décidé de laisser les choses qui gâchent la vie dehors et se faire un bon petit déjeuner ! C'est alors qu'il lui confia vivre avec sa meilleure amie et Lillya voulut aussitôt s'allier avec elle pour le remettre sur les rails ! il était persuadé qu'elle la rencontrerait avant de savoir qui elle était.
« Peut être et je suis certaine que l'on trouvera un terrain d'entente ! » Lillyana se demanda s'il n 'y avait réellement aucune ambiguité, ou s'il y en avait eu une un jour. Camden semblait accro à Angie depuis toujours et pour toujours mais qu'en était il de son amie ? avait elle gardé le silence, comme elle avec Damian, pour ne pas le perdre ? Biensur ce n'était pas à lui qu'elle poserait la question, vu ce qu'il disait, si son amie avait eu d'autres sentiments pour lui, il n'avait rien vu.
Enfin ils parlèrent voyage, tandis que Lillyana se servait un thé, comme toute vraie anglaise. « Quelques faveurs ? Avec les hôtesses tu veux dire ? » dit elle en riant elle aussi. Elle sortit les muffins et lui demanda ses plans pour la journée. Visiblement non, tout au contraire même. Du coup il accepta d'être lecteur test et lui donner son avis sur ses derniers écrits. Lillyana sourit. De temps à autre, elle faisait lire ce qu'elle préparait, cela lui permettait de prendre des avis et voir quelle direction suivre.« Super ! Tu es embauché alors ! C'est un thriller et disons... que j'hésite sur certaines réactions masculines. Tu pourras m'éclairer un peu et me dire ce que tu penses du reste. » déclara-t-elle avant de croquer dans un muffin et le déguster. Elle s'imaginait Camden assis sur la terrasse, face à la mer, plongé dans son manuscrit; cette vision lui plaisait assez ! Peut être qu'elle trouverait un homme que ses écrits passionnent. Ce serait fantastique ! « Tu aimes lire d'ordinaire ? Ou tu préfères attendre que ça sorte en film ?» ajouta-t-elle en riant. « d'ailleurs dis moi, c'est quoi tes loisirs ? Et ta plus grande passion ? »