Cela faisait presqu’une semaine que Jessie était rentré à la maison, à Hope Mills, et déjà elle avait envie de repartir ! Jessie avait en fait décidé il y a près d’un an et demi de fuir la ville suite à la mort soudaine d’une de ses meilleures amies, Lynn. Elle et ses autres amis, appelé « la bande » dans le coin, avaient beaucoup soufferts et avaient donc eu beaucoup de mal à se remettre. La « bande » s’était formée il y a des années, et tous étaient devenus très proches. Mais c’était principalement leur lien avec Lynn qui les avaient rapprochés : en effet, la bande se composait de Lynn, d’Aidan son mari, de Noam son frère, de Charly sa meilleure amie, et un peu plus tard de Josh & Joyce. Jessie les adorait tous autant bien que secrètement amoureuse d’Aidan, mais après une soirée dans les bras de ce dernier, elle avait préférait quitter la ville, pensant que c’était la meilleure solution pour elle, et surtout pour Aidan. Elle s’en voulait terriblement, et penser que partir était le meilleur moyen de se faire oublier, et d’oublier sa peine.

C’est ainsi qu’elle partie, valises sous les bras, faire le tour des Etats-Unis, même si sa première escale se fit à Paris, sa ville natale. Elle avait « visité » beaucoup d’Etats et de villes différentes pendant presque deux ans, fait beaucoup de rencontres, hommes et femmes de tout âge. Mais la rencontre qui l’avait le plus marqué était certainement celle de Preston Borrows, un jeune homme de deux ans son aîné. Celui-ci se trouvait en difficultés quand Jessie le vit pour la première fois. En effet, deux gars d’un gang adverse étaient en train de le frapper dans une ruelle près d’un bar où la jeune femme travaillait. Elle, aussi timide et discrète qui soit, avait pris son courage à deux mains, et leur avait crié de s’arrêter, prête à appeler la police. Ils ont ensuite pris la fuite, et elle s’est occupée de lui. Elle l’a soigné, et hébergé, et depuis, il ne l’avait plus quitté. Il était très différent d’elle, un peu bad boy, mais lui faisait beaucoup pensé à son ami Josh. Elle l’a aidé à se sortir de la drogue, et lui a lui changé les idées en l’aidant à s’amuser un peu lors de soirées.
Aujourd’hui, ces deux là se retrouvent à Hope Mills, partageant un appartement sur Monterey Avenue, l’une des rues commerçantes de la ville. La collocation se passe bien pour les deux amis, mais Jessie s’est aussi rendu compte que depuis leur retour, elle l’avait un peu laissé de côté. Elle avait tout fait pour retrouver ses anciens amis, voir ce qu’ils étaient devenus, mais n’avait plus parlé avec Preston depuis. Il était devenu son meilleur ami, et les discussions ou les câlins avec lui lui manquaient terriblement. Pour se faire pardonner de cette absence, Jessie avait décidé de lui préparer un repas. Elle savait qu’il ne travaillait pas ce soir, et avait été faire les courses dans la journée. Preston étant barman au Bones (le bar que tient d’ailleurs Charly, l’une de ses amis de la « bande »), ils ne s’étaient pas vus de la semaine : quand il se levait, elle était déjà partie et quand il allait travailler, elle n’était pas encore revenue, alors une soirée avec lui était la meilleure chose à faire. Jessie était loin d’être bonne cuisinière, mais ferait tout pour lui faire plaisir. Elle espérait quand même qu’il ne lui ferait pas la tête toute la soirée, et qu’il lui pardonnerait vite son attitude des derniers jours.

Elle enfila donc son tablier, et commençait la cuisine quand elle entendit Preston qui arrivait. Il ôta son manteau, et la rejoint de suite dans la cuisine. Il ne dit pas un mot, alors Jessie entama la conversation :

« Preston… Tu as faim ? Je t’ai préparé le dîner pour me faire pardonner… ».

Elle lui fit un grand sourire, espérant que cela suffise à le mettre de bonne humeur…

Ces jours si, Preston avait le moral à zéro. Il avait l'impression que Jessie l'ignorait et qu'elle ne voulait plus vraiment passer du temps avec lui. Officiellement, c'était sa meilleure amie, bien que des sentiments plus profonds envers la jeune femme se soient développés pendant leur voyage d'un peu moins de deux ans à travers les Etats-Unis. Il n'avait jamais était aussi proche et n'avait jamais passé autant de temps avec une personne comme il l'avait fait avec Jessie. Avant qu'il ne la rencontre, il n'avait pas d'ami, uniquement des relations, puisque sa vie tournait autour de la drogue. Très souvent il se demandait ce qu'il serait devenu si elle ne l'avait pas sorti de cette misère. Peut être serait-il en prison, ou tout simplement mort, reposant en paix au Holy Cross Cemetery ? Ca, Dieux seul le sait. Sobre grâce à elle, il ne pouvait s'empêcher tout de même de prendre quelques verres au Catalist ou au Bones, où il travaille pour Charly. Jessie lui manquait, elle et leurs journées, passant leur temps à se balader, leurs petites soirées, leurs câlins le soir... Preston voulait vraiment que tout cela redevienne comme avant. Il se sentait bien avec elle. Lorsqu'il se réveilla, comme d'habitude Jessie était partie. Sans elle, Preston trouvait leur appartement sur Monterey Avenue complètement vide. Il avait de plus en plus besoins d'elle, car Liam revenait hanter ses pensées. Maintenant que la jeune femme n'était plus à ses côtés, les mauvais souvenirs refaisaient surface, ainsi que les cauchemars. Preston n'a jamais réussi à faire son deuil : Liam était son unique raison de vivre. Bien souvent il a pensé à mettre un terme à ses jours, sans jamais y parvenir. Peut être parce qu'il avait peur au fond. Comme chaque matin, il restait du café que Jessie avait préparé. Il s'en servit une tasse et la fit chauffer légèrement. Il s'assit à la table pour prendre son petit déjeuner. L'appartement était vide, silencieux et sinistre. Preston ne voulait pas rester une seconde de plus ici. Il parti donc dans la salle de bain pour une douche rapide, enfila le premier t-shirt qu'il trouva ainsi que le jean de la veille. Il prit tout de même soins de sa coiffure, comme à son habitude, puis partit. Bien qu'il ait arrêté de fumer, Preston ne put s'empêcher d'aller acheter un paquet. Avec tout ce qu'il se passait en ce moment, une cigarette ne lui ferait pas de mal. Il passa sa journée à marcher, s'arrêtant tout de même quelques instants au parc. Il se remémora alors cette funeste journée où son père lui avait annoncé la mort de son frère. Il n'avait même pas était à son enterrement. Fixer la boîte où se trouvait son frère lui aurait été insupportable. Il était dix neuf heures lorsqu'il décida de rentrer. Jessie irait surement dormir chez une amie puisque ce soir il ne travaillait pas. Il passerait donc la soirée seule et ne sortirait pas. Une fois à l'appartement, il fut agréablement surpris en se rendant compte qu'elle était là. Une chose qu'il n'avait pas prévue, c'est qu'il empesterait la cigarette. Il posa son manteau et la rejoint sans attendre à la cuisine. Son visage n'exprimait aucune expression. Il resta silencieux, la regardant faire. Il n'avait absolument pas envie d'engager une conversation, il savait très bien qu'elle s'en chargerait. Il l'écouta, et admira son sourire. Cependant, il ne voulait pas la pardonner tout de suite et mit quelques secondes avant de lui répondre.

« Qu'est-ce que tu prépares ? »

Intérieurement, Preston était le plus heureux des hommes, mais il voulait quand même lui faire comprendre qu'elle l'avait profondément blessé, aussi dure que ce serait. Il devait s'empêcher de la prendre dans ses bras et d'exploser de joie, ce qui n'était pas une mince à faire.

Jessie fut d’abord contente que son ami l’ait rejoint dans la cuisine, et le sourire qu’elle venait de lui tendre s’effaça en voyant sa tête. Celui-ci ne semblait vraiment pas content, mais Jessie le comprenait. Elle avait été nulle, égoïste et absente : tout le contraire de ce qu’elle était en général. Revenir à Hope Mills n’était déjà pas une bonne idée, mais revenir avec Preston devait être encore pire. Pas qu’elle ne l’aimait pas ou que sa présence le gênait, mais elle aurait du se douter que l’intérêt qu’elle portait à ses anciens amis l’aurait embarrassé. Quand elle l’eut y parler, il mit quelques secondes avant de lui répondre, ce qui la mis un peu mal à l’aise. Dans sa voix, elle pouvait sentir sa tristesse. Car oui c’était de la tristesse et non pas de la colère qu’avait Preston après cette semaine d’absence. Jessie se sentit encore plus mal. Elle détestait voir son meilleur ami triste. La relation qu’ils entretenaient tous les deux allaient en fait, bien au-delà de l’amitié. Elle ne savait pas vraiment la définir, mais ce n’était pas une amitié banale. Et le voir ainsi la rendit encore plus malheureuse.

« De la blanquette de veau, c’est français… »

La France était le pays d’origine de la belle, et tout ce qui s’y rapportait la fascinait, c’est pourquoi elle avait décidé de préparer cela. Elle ne savait pas si cela allait être bon, mais elle l’avait fait avec bon cœur, et espérait que ça lui plairait. Il ne répondit rien encore une fois. Jessie n’avait qu’une envie : le prendre dans ses bras, mais elle se retint. Elle se retint parce qu’il lui en voulait, et surtout parce qu’elle le méritait. Elle méritait qu’il ne lui parle plus, et même qu’il ne l’aime plus. Elle avait été minable, et s’en voudrait longtemps. Preston était le seul à qui elle pouvait se confier depuis deux ans, le seul à qui elle pouvait faire confiance. Elle s’approcha de lui, et remarqua qu’il sentait la nicotine à dix mètres. Elle savait que le jeune homme avait fait des efforts pour devenir bon, qu’il avait arrêté la drogue, l’alcool, la cigarette etc. : tout ce que lui avait conseillé Jessie. Et elle avait tout gâchée. S’il avait recommencé à fumer, elle pensa qu’il avait peut-être recommencé à dealer, et elle ne pourrait s’en prendre qu’à soi-même encore une fois. Elle ne faisait rien de bon. Tout ce qu’elle touché, tout ce qu’elle aimé finissait pas disparaître ou se détruire. Elle s’arrêta à quelques centimètres de lui, tandis que de son côté, Preston ne bougeait pas d’un fil. Elle était tellement honteuse de son attitude qu’elle n’arrivait même pas à le regarder dans les yeux. Cependant, elle se jeta quand même à l’eau :

« Preston, je suis vraiment désolée. J’ai été nulle, et même la pire des amies qu’on puisse avoir. Je t’ai laissé tomber alors que tu es le seul qui ne m’ait jamais lâché… ».

Il la regarda, et alors elle leva la tête pour plonger à son tour son regard dans le sien :

« Tu m’as manqué cette semaine ».

Elle ne savait pas trop comment il allait réagir, alors elle se dirigea vers le placard à assiettes…

Preston n’arrêtait pas de regarder Jessie. Ca lui faisait plaisir, et d’un autre côté ça la gênait. Elle l’adorait et être fâché contre lui était l’une des choses qu’elle détestait par-dessus-tout. Elle savait qu’il ne comprenait pas pourquoi elle avait été si distante cette semaine, mais elle en avait eu besoin. Voir ce que ses amis étaient devenus avait été tout aussi difficile que de partir il y a deux ans. Parce que oui elle les avaient vus, mais ne leur avaient pas encore reparlés. Sa réponse quand au fait que c’est elle qui lui avait surement le plus manqué la toucha énormément, elle en eut presque les larmes aux yeux. Elle savait qu’elle comptait beaucoup pour lui, et c’était réciproque, seulement elle avait plus de mal à le montrer. Elle ne répondit rien, et se remit aux fourneaux, car elle n’avait pas fini son repas. Elle aida ensuite Preston à mettre la table, toujours dans le silence. Un silence qui lui pesait trop. Elle le vit allumer une cigarette, alors qu’il avait arrêté depuis que Jessie l’avait rencontré et ne put s’empêcher de lui faire remarquer. Elle s’approcha donc de lui, et la lui retira en disant :

« Je croyais que tu avais arrêté ».

Elle était à deux pas de lui, le regarda droit dans les yeux, et le prit dans ses bras. Elle entoura ses bras autour de lui, mais lui ne bougea pas. Elle voulait tellement qu’il réagisse, qu’il la prenne à son tour dans ses bras, et qu’il soit heureux de la retrouver qu’elle lui murmura un dernier :

« Encore une fois, je suis désolée Preston. Si tu savais à quel point je t’aime ».

Elle l’aimait, oh oui qu’elle l’aimait son Preston. Durant les deux dernières années, Preston avait été là pour elle. Il ne l’avait pas abandonné, et était même revenue avec elle à Hope Mills donc oui elle l’aimait, bien sur qu’elle l’aimait. Elle espérait vraiment que cette histoire n’allait pas gâcher cette amitié très spéciale qu’ils entretenaient tous les deux. Après ces « retrouvailles », Jessie l’emmena dans le salon, oubliant totalement le repas, le jeta presque dans le canapé et se blottit dans ses bras sachant perpétuellement qu’ils allaient passer la soirée à discuter…

Quand Jessie retira la cigarette du bec de Preston, celui-ci lui expliqua qu’il avait été très mal cette semaine, notamment à cause d’elle. Elle se sentit mal, mais savait que dans le fond, il la comprenait. Il la comprenait toujours. C’était une des nombreuses raisons pour lesquelles ils étaient amis tous les deux. Ils étaient si différents, et pourtant, ils avaient réussis à s’entendre. Réussis à construire ce qu’il se rapproche le plus d’une belle amitié. Il l’avait beaucoup aidé, et inversement. Ils se complétaient, et Jessie n’imaginait plus sa vie sans lui à ses côtés.

« Pourquoi en ce moment ? Qu’est-ce qu’il se passe ? Je sais que je n’ai pas été très présente, mais ce n’est pas à cause de ça que tu es si mal ?... Il y a quelque chose d’autre ? Ton travail au Bones se passe bien ? »

Il la regarda dans les yeux, un peu confus suite à ce harcèlement de question. Jessie se mit à rire, se rendant compte de la situation. Il récupéra sa cigarette, que Jessie lui laissa :

« Ok, mais c’est la dernière hein. Promis ? »

A l’époque, Preston lui avait promit d’arrêter ces bêtises, ce qu’il avait fait. Jessie tenait à lui, et ne voulait certainement pas qu’il redevienne comme avant : dépendant à toute sorte de substance, ou à l’alcool. Il avait changé, et il l’avait changé. Jessie n’était plus la même depuis sa rencontre avec lui. SI on lui avait dit un jour, elle deviendrait la meilleure amie d’un gars comme Preston, elle ne l’aurait pas cru. Maintenant tous les deux dans le canapé, Jessie mit sa tête sur les genoux de Preston, qui lui fit un baiser sur son front, comme avant. Ce geste lui plu, et elle lui sourit en retour. Il était définitivement son Preston. Quelques secondes après, il entama la conversation, lui demandant si elle avait revu ses amis.

« J’en ai revu quelques uns… mais je ne leur ai pas parlé. Et toi, tu as fais de nouvelles rencontres ? »


Jessie avait été assez égoïste avec lui cette semaine pour encore lui parler de ses problèmes. Oui, elle avait aperçu certains de ses amis : Josh, Charly et aussi Aidan, mais elle n’avait pas encore réussi à leur parler, et à leur montrer qu’elle était de retour.
Toujours la tête sur les genoux de son ami, Jessie lui attrapa la main qu’elle sera dans la sienne. Par ce geste, elle voulait juste lui montrer qu’elle n’avait pas changé. Et qu’elle ne changerait pas, même si elle restait à Hope Mills et qu’elle retrouvait ses amis. Elle voulait lui faire comprendre qu’il aurait toujours une place dans sa vie.